Phare des Grands Cardinaux
1877-1879
Pierre
Béton
27 m
Feux : 4 éclats, 15 s ;
Optique fixe, Focale : 0,25 m ;
Lanterne : lampe 80 W ;
Portée : 12,5 milles
Automatisé en 1973
Ce phare constitue un « point tournant » dans la vie d’un homme, Léon Bourdelles (1838-1899). Né loin de la mer, à Périgueux, Bourdelles est admis à 19 ans à l’Ecole polytechnique, dont il sort deux ans plus tard pour intégrer le corps des Ponts et Chaussées. En 1862, il rejoint le service des travaux hydrauliques de Lorient, où quelques ingénieurs des Ponts travaillent à l’aménagement du port militaire, alors en pleine mutation. Bourdelles supervise la construction des quais et des grands ateliers de Caudan, sur la rive gauche du Scorff, et s’occupe du curage du port militaire.
Après la défaite de 1870, le jeune ingénieur accepte de siéger au conseil municipal de Lorient. La manifestation de ses idées républicaines, un «pur radicalisme », et sa participation à des obsèques civiles inquiètent le préfet qui obtient son renvoi de l’Arsenal. Nommé dans un service civil, il prend la responsabilité, entre autres, des travaux d’éclairage et de balisage des côtes morbihannaises. Il s’attaque alors à la construction du phare des Grands-Cardinaux, au Sud-Est d’Hoedic.
Le projet d’un phare en mer n’est pas nouveau. Dès 1836, le préfet du Morbihan l’avait réclamé à la Commission des phares, qui avait opté pour une construction à terre, sur Hoedic, devant les difficultés d’un tel chantier. Quarante ans plus tard, les progrès de la navigation et la pression imposée au transport maritime imposent partout une révision du réseau de signalisation, réactivant les « bonnes idées » enfouies dans la mémoire des fonctionnaires et des marins. C’est le cas à l’extrémité de la chaussée de Quiberon. Mettant en oeuvre toutes les compétences du travail à la mer, Bourdelles propose une organisation rigoureuse du chantier, « en combinant les différentes parties de l’ensemble de manière que chacune d’elles fut indépendante et que le chômage d’une des parties ne paralysât pas le fonctionnement général ».
Pour approvisionner le site en matériaux, il suggère d’utiliser des chaloupes de faible tirant d’eau, au lieu des lourdes gabares habituelles, d’un tonnage plus important, mais plus lentes et moins manoeuvrantes. Pour éviter que les ouvriers ne soient emportés par les lames, il prévoit de les installer sur un échafaudage en charpente autour duquel la tour serait érigée. Enfin, il envisage d’installer une sorte de « chemin de fer aérien » entre deux rochers, pour faciliter le déchargement des bateaux au mouillage en évitant les délicates manoeuvres d’accostage. Les travaux commencent en août 1877 et, grâce à une organisation impeccable, la lanterne des Grands-Cardinaux est posée deux ans plus tard. La Commission des phares se déclare frappée « de la rapidité avec laquelle l’entreprise a été conduite, ainsi que des dispositions habiles qui ont présidé à l’organisation du chantier, dans une localité aussi dépourvue de ressources que l’île d’Hoedic ». Moins de deux ans après cette spectaculaire réussite, Léon Bourdelles intègre le Service des phares, dont il deviendra directeur en 1893, jusqu’à sa mort en 1899.
École nationale des ponts et chaussées